Conférence de Sainte-Anne CSA06 du 12 juin 2023
Florence Vial-Aubey est psychologue, Docteur en psychologie,
psychanalyste membre de la SPP et du GPLRA.
En pratique hospitalière ou libérale, nous rencontrons avec plus ou moins de violence ou de sidération une clinique qui peut nous dérouter en nous confrontant à des sujets habités partiellement ou de façon plus étendue par le blanc, le vide, le désinvestissement. Nous relevons chez ces patients une certaine absence d’émotion, une absence partielle ou totale de représentations des expériences qu’ils ont vécus, d’affects, de capacités narratives. Nos vécus transféro-contre-transférentiels peuvent alors être mis à rude épreuve comme de nombreux auteurs ont pu en témoigner. Ces patients sont là, en face de nous, et en même temps, de manière ponctuelle, circonstanciée ou plus générale, ils sont absents à eux-mêmes, absents à certaines expériences qu’ils ont vécues, à certaines parties de leur histoire qu’ils ne peuvent pas raconter. Le rien s’impose, que recouvrent parfois l’excitation, l’agitation, le débordement. Un rien que tente de faire tenir des constructions en faux-self, et avec le rien : le retrait psychique, les trous des oublis, des silences, d’un discours opératoire, factuel ou descriptif, d’un récit attaché parfois à l’histoire des autres.
Cette clinique de l’effacement psychique nous confronte à quelque chose d’insaisissable qui échappe au patient, au soignant. La rencontre avec l’effacement psychique a suscité en moi de nombreuses réflexions qui m’ont conduite à un travail de recherche dans lequel j’ai tenté de cerner ce non-cernable.
Ces réflexions, toujours au travail, sont issues de ma pratique de psychologue et de psychanalyste en hôpital psychiatrique et en libéral. Elles prennent appui sur un corpus analytique composé des œuvres de Freud et de ses continuateurs dont Winnicott, Ferenczi, D. Anzieu, A. Green pour ne citer qu’eux, et sur les travaux du centre de recherche en psychopathologie et psychologie clinique de l’université Lyon 2, le CRPPC, dont l’épistémologie est fondée sur la théorie psychanalytique et une approche psychodynamique du fonctionnement psychique.
J’aimerais partager avec vous ce soir cette réflexion qui propose d’aborder l’effacement psychique comme un objet psychique à saisir et non pas comme l’expression d’un déficit. Cette clinique témoignerait d’un processus d’effacement psychique organisant le moi du sujet, organisant son rapport à lui-même, à l’autre, à l’environnement. Il mettrait à jour, pour chaque sujet, les processus qui le régentent et les expériences désubjectivantes qui le construisent.
Au-delà du constat du blanc d’affects et de représentations, du retrait de la subjectivité, l’effacement psychique serait une modalité de rencontre, une caractéristique du discours, de la pensée, de l’histoire du sujet et entrerait comme tel dans la chaîne associative et le récit du patient.
Si l’effacement psychique n’a jamais été théorisé, la notion d’effacement, qui appartient d’abord au langage courant, n’est pas nouvelle. Elle apparait dans la langue française au 12° S, avec le verbe « effacer » qui signifie « faire disparaître une face (une figure) », « faire disparaître de la pensée sans laisser de trace ». Dès le 16°S, la voie pronominale « s’effacer » apparaitra avec le sens d’« empêcher de paraître par sa propre existence », « se tenir de côté ou de retrait ». Cette notion, qui n’est pas un concept analytique, est fortement présente dans tous les domaines. On la trouve dès les débuts de la psychologie dans la traduction en français ancien de Psychologie ou traité sur l’âme, écrit et publié en 1745 par Ch. Wolf. L’effacement y est relié à des idées, des sensations, des impressions trop fortes. Il y serait d’emblée associé à la question économique qui filera plus tard toute l’œuvre de Freud.
Dans les traductions en français des œuvres de Freud, le terme « effacé » apparait très peu et est le fait des traducteurs. Jean Laplanche l’utilise pour rendre compte des mots allemands utilisés par Freud : « Verschwinden, » qui évoque que quelque chose disparaît en se soustrayant à la vue ou en se rendant insaisissable, et « Schwinden » qui implique un mouvement de disparition lent et doux, dans le sens de « s’amenuiser, s’évanouir, fondre ». Que ce soit « l’objet qui s’efface au profit de l’organe » dans le fonctionnement des pulsions sexuelles, ou « la motion qui est effacée de la conscience » dans le refoulement, ces traductions mettent en évidence un mouvement dynamique dont se rapproche le mouvement dynamique d’effacement. Dans le refoulement, mais aussi le clivage, quelque chose, dans les enjeux mobilisés par les forces pulsionnelles est mis hors de la conscience ou hors du moi, au profit du maintien de l’équilibre psychique.
Deux destins de l’effacement psychique pourraient être déduits du corpus freudien.
Un premier, invisible et silencieux soutient l’émergence subjective et participe aux processus de différenciation. Il se compose de l’effacement de l’objet réel, indispensable au développement des pulsions autoérotiques et à la construction de représentations d’objet interne, Ce que développeront notamment D Winnicott avec le paradoxe de la capacité à être seul en présence de la mère (1958), A. Green (1966) avec l’hallucination négative de la mère qui devient structure encadrante pour le sujet lui-même. À celui-ci se combine l’effacement de la figure paternelle comme le décrit Freud dans Totem et tabou, nécessaire à la construction d’un processus civilisateur, et l’effacement du sujet lui-même comme le rappelle R Roussillon qui soulignera dans Agonie, Clivage et Symbolisation la nécessaire participation d’un certain effacement subjectif au processus de symbolisation primaire.
Ces effacements silencieux, invisibles, participent à la constitution d’un fond psychique subjectivant.
Le deuxième destin de l’effacement psychique, celui qui nous intéresse ce soir, ne se fait pas oublier et le travail analytique ou psychothérapeutique butte souvent contre lui. Il relève de l’économie traumatique décrite par Freud en 1920 : des expériences dont la charge pulsionnelle dépasse les capacités de contenance du Moi de l’infans, effractent le moi et créent des impacts traumatiques dans le sujet. Il peut être bruyant, invalidant, douloureux, silencieux, mortellement présent quand il conduit à la mort psychique ou physique. Il côtoie la clinique du blanc, du négatif, du retrait psychique dont la réflexion, amorcée par Freud avec ses théories du refoulement et du clivage, a été poursuivie et développée par ses continuateurs confrontés aux problématiques hystériques, psychotiques, limites, psychosomatiques.
Dans la littérature analytique contemporaine les termes « effacés, effacement » sont fréquemment utilisés. Ils décrivent un état, un constat, un résultat : on relève l’effacement des affects, de la représentation, l’effacement du sujet, de l’objet, du lien à soi-même, à l’objet ou à l’environnement ; l’effacement des investissements ou des traces. Il sera aussi abordé sensoriellement : on parlera alors de vécus ou d’angoisses d’effacement. Sous forme plus dynamique, seront évoqués des processus ou des modalités d’effacement.
Les cliniques de la psychose et de l’autisme, du blanc, du négatif nous y conduiraient.
P-C. Racamier (1980) décrit les expériences psychotiques comme des « vécus d’évanouissement du « je », de syncope (…) du sentiment du moi qui se traduisent par des (…) éclipse(s) du moi dans une ultra dépersonnalisation ». P. Aulagnier décrit des blancs par lesquels des parties du plaisir, du désir seront exclus de la pensée et de l’investissement. R Roussillon (1999) décrit une neutralisation énergétique qui induit un gel psychique touchant les affects, la représentation.
Le Narcissisme négatif d’A. Green (66-67), nous y conduit par la tendance à « l’inexistence, l’anesthésie, le vide, le blanc, que ce blanc investisse les affects (l’indifférence), la représentation (l’hallucination négative), la pensée (psychose blanche) ».
Le travail du négatif le sollicite. À ce propos, René Kaës écrira en 1987 qu’il nous confronte à « un objet dont la pensée se dérobe », à « un meurtre silencieux, un blanc, un trou, une éclipse du sujet par ce qui a été forclos et qui n’ayant pu recevoir d’inscription dans le sujet reste sans représentation ».
André Green (1993) y relève un « travail de renoncement à l’objet » dans lequel, la désexualisation, la désaffectation qui conduit, pour reprendre ses mots, à « une cadavérisation psychique », évoque l’effacement psychique.
Enfin, Le travail sur le blanc développé essentiellement par André Green, rejoint cette question de l’effacement. Il décrit le blanc comme « espace inoccupé et vide qui renvoie à l’invisible, l’imperceptible, l’insensible à la limite de l’impensable et de l’inconcevable ». Un blanc qui n’est pas « entre les représentations et les pulsions », écrit-il, mais un blanc qui gomme, efface les représentations ». Ce blanc, « royaume du désinvestissement », se décline selon lui en série blanche : « hallucination négative, psychose blanche, deuils blancs tous relatifs à la clinique du vide ou du négatif… sont le résultat d’un désinvestissement radical… qui laisse des trous psychiques. ».
Chez de nombreux auteurs le blanc sera à mettre en lien avec le refoulement et le clivage bien sûr. Il sera présenté comme une défense et sera lié aux impacts traumatiques logés dans la rencontre avec l’environnement premier. Une rencontre qui, comme le souligne A. Green dans le travail du négatif « dépasse de loin le renoncement au plaisir sexuel, (et) rencontre la question de l’absence de l’objet et des expériences liées à cette absence dont la puissance pulsionnelle a un effet traumatique. Une absence qui suscite des affects d’une vivacité et d’une intensité telles que le sujet peut chercher la délivrance totale à l’égard de l’objet, condition du plaisir ou du déplaisir ».
Le processus d’effacement psychique de même s’originerait dans la rencontre avec l’objet et les processus engagés par la dialectique présence/absence. Il serait au cœur de la métabolisation de l’expérience de séparation/individuation et des échecs de celle-ci dont il serait le témoin.
Issu des expériences archaïques traumatiques vécues par l’infans dans la relation à ses objets primaires, il serait à la fois le résultat des défenses intrapsychiques mises en place par le sujet mais aussi celui des modalités de présence de l’objet, de sa capacité et de sa qualité d’accueil des mouvements pulsionnels de l’infans.
Le processus d’effacement psychique se construirait en trois temps.
Les deux premiers temps vont articuler les expériences archaïques traumatiques auxquelles l’infans non préparé est soumis passivement, leurs impacts sur le moi du sujet et la mise en place d’une organisation défensive. Ces deux premiers temps s’ancrent dans de nombreux développements de la question du traumatique inaugurés par les travaux de Freud en 1920.
Le premier temps, est donc celui des expériences traumatiques, celui du « traumatisme cumulatif » comme le nommera M. Khan en 1974, qui sera le cumul d’expériences caractérisées par la défaillance de l’objet maternel. Suivant principalement les travaux de Ferenczi et de Winnicott, c’est l’absence de réponse de l’objet si celui-ci n’est pas là trop longtemps, ou ses réponses insatisfaisantes et/ou inadéquates aux besoins du Moi de l’infans qui engendrent des expériences traumatiques. Ces expériences créent un état de détresse dans le sujet qui dépasse ses capacités de liaison et entrave l’organisation défensive. Ferenczi évoque alors un point de rupture dans le sujet, « un choc », une « commotion psychique » qui aurait pour conséquence immédiate une fragmentation du sujet. Winnicott parle lui « d’effondrement du self unitaire », de « perte du sentiment de continuité d’être », « d’agonie psychique ». Bion parlera de « terreur sans nom ». Le sujet est alors mis hors de lui, décrit Ferenczi. Ces expériences catastrophiques sont des expériences d’effacement psychique .
Ce premier temps est suivi par celui des défenses primaires auxquelles l’infans va recourir pour organiser une protection contre l’atteinte traumatique. Pour survivre « coûte que coûte » à la terreur de leur retour, écrira Ferenczi (1939), le bébé fera appel à « la folie », à « l’anesthésie », ou encore à « être un corps sans âme ». Il pourra aussi avoir recours à une « atomisation de sa vie psychique ». Pour Winnicott si la sensation de la folie est non éprouvée du fait de l’effondrement des défenses, « la menace de la folie » a été « éprouvée », accompagnée d’une angoisse « impensable ». Le deuxième temps, celui de la défense, est un temps paradoxal. Suivant le renversement pulsionnel proposé par Freud en 1920, qui porte sur l’expérience et permet de transformer l’expérience vécue passivement en expérience active, Winnicott propose l’organisation d’une modalité défensive paradoxale, dont R Roussillon poursuivra la réflexion en conceptualisant une défense paradoxale, qui ici pourrait se formuler ainsi : s’effacer pour ne pas être effacé. L’infans se retirerait de lui-même, s’effacerait activement, ou/et effacerait son environnement pour éviter d’être surpris par un retour de l’expérience d’effacement, retour imposé par la réalité externe ou la réalité interne, et qui produirait une nouvelle expérience traumatique. Ce mouvement défensif renvoie au troisième temps du traumatisme développé par Winnicott : le temps Z, qui succède au temps X, Y, caractérise un état de détresse sans secours, un état de manque insupportable qui tourne en état traumatique, et dont la seule issue est le retrait psychique. Pour « survivre », le sujet se retire à nouveau de la scène, et met en place ce que R Roussillon appelle un « clivage au moi » (1999) Le sujet se coupe de la trace de l’expérience agonistique dans laquelle il est pris. Il se coupe d’une partie de sa subjectivité. L’expérience qui a eu lieu, n’a pas eu lieu pour le sujet. Alors, sous la surface en faux-self (Winnicott) organisée comme issue à ces expériences, il y aura, écrit Ferenczi, un « moi assassiné, une masse affective séparée, inconsciente et sans contenue ». Le sujet est frappé, marqué, construit par l’effacement psychique.
Le processus d’effacement psychique prendrait racine dans ces expériences traumatiques qui sont des expériences d’effacement ayant eu lieu dans les tous premiers temps de vie du sujet et qui n’ont pas pu s’inscrire dans la chaine représentative, du fait de l’immaturité du moi, du fait de l’absence ou de la défaillance d’un objet pouvant accueillir, contenir, traduire, refléter ces expériences pour les rendre appropriables par le moi de l’infans et en permettre la symbolisation.
Ces expériences traumatiques vécues par le sujet laissent des traces en celui-ci. Freud va développer tout au long de son œuvre une théorie de l’inscription dans le psychisme des expériences vécues par le sujet. Il va proposer que les expériences doivent entrer dans une chaine composée de plusieurs inscriptions successives pour se constituer en souvenir liant des représentations de celles-ci et les affects qui lui sont associés. Ces expériences successives sont possibles du fait d’un abaissement et d’une transformation de la quantité d’excitation qu’elles recèlent. Freud propose que la quantité d’excitation de certaines expériences est telle qu’elles échappent à ces transformations, et qu’elles restent en l’état dans le sujet, sous forme de « fueros ». Elles échappent donc au système représentatif, à leur mise en représentation, en mot, en souvenir. Elles restent « conservé(es), enseveli(es), inaccessible à l’individu… » sans subir une « destruction totale » (Freud 1937). Ces expériences non transformées sont des expériences sensorielles, corporelles. Inscrites en premier lieu sous forme de traces mnésiques perceptives, elles siègent dans le ça, et sont soumises à la contrainte de répétition, décrite Freud en 1920 dans Au-delà du principe de plaisir. Ces traces mnésiques perceptives sont réactivées dans la rencontre avec l’actuel du sujet par réinvestissement hallucinatoire. Freud dans Construction en analyse propose que l’hallucination soit « le retour d’un événement oublié des toutes premières années, de quelque chose que l’enfant a vu ou entendu à une époque où il savait à peine parler. ». Les traces de ces expériences corporelles, traces mnésiques perceptives, se présenteront alors dans le sujet « sous forme de sensations, de perceptions hallucinées, sous formes d’affects bruts ou d’agirs, de poussée motrice » comme le propose R Roussillon. Les travaux du CRPPC à Lyon s’articulent autour de cette question des traces des expériences premières laissées dans la psyché et le corps du sujet, sur leur saisie et leur symbolisation.
Les deux premiers temps du processus d’effacement psychique, celui des expériences traumatiques qui échappent au système représentatif, et celui des défenses paradoxales mises en place par le sujet vont être ainsi appréhendables dans le discours des patients et dans la dynamique transféro-contre-transférentielle par la saisie des traces de ces expériences. Celles-ci se manifesteront via l’émergence de vécus corporels s’exprimant sous forme de signifiants formels.
La théorie des signifiants formels a été développée par D. Anzieu en 1987. Les signifiants formels sont des vécus hallucinatoires qui s’imposent dans le sujet sous forme corporelle. Ils sont issus d’impressions précoces vécus dans un espace non différencié entre le sujet et le monde extérieur. Ce sont des représentants de contenus psychiques, des représentations de l’espace et des états du corps. Ils décrivent un mouvement, l’émergence d’une expérience non appropriée, des premières figurations du corps et des objets soumises à une transformation. Ils concernent les formes, leurs transformations, leurs évolutions, leurs configurations. Ils sont l’expression d’une impression corporelle que le sujet ne reconnait pas comme lui appartenant et en cela ils expriment des expériences dont le sujet n’est pas sujet. En 1990 D. Anzieu précisera que si « les signifiants verbaux sont nécessaires pour travailler en termes économiques, les signifiants formels le sont pour travailler en termes topographiques, pour décrire le Moi, ses niveaux d’organisation, les failles de ses fonctions ». (P67).
Les expériences archaïques traumatiques d’effacement psychique seraient saisissables, dans le sujet, dans l’émergence des signifiants formels relevant des traces corporelles de leur première inscription. Elles émergeront dans le sujet sous la forme d’expériences sans sujet ni objet ainsi que le développent les travaux du CRPPC. Les signifiants formels d’effacement seront : « ça disparaît, ça glisse, ça se dissout, ça efface…». Ainsi le non-saisissable, le non-représentable de ces expériences pourra être saisi. L’appropriation subjective de l’expérience deviendrait possible, elle pourrait entrer dans le système représentatif et être réintégrée dans la réalité historique du patient. Les traces mnésiques perceptives de ces expériences seront aussi saisissables dans la dynamique transféro-contre-transférentielle, par « l’effacement partagé ». Aux notions d’identification projective, de transfert corporel, ou de transfert par retournement Anne Brun propose l’ajout du concept de « signifiant formel partagé » par lequel le patient partage avec le psychologue, dans des vécus corporels de transfert, ces signifiants formels qui abritent les éprouvés, les vécus corporels traumatiques logés dans les traces de ces expériences archaïques : ça sidère, ça troue, ça asphyxie, ça ampute psychiquement…
Pour revenir sur ces deux premiers temps du processus d’effacement psychique, je vais vous présenter la rencontre avec une patiente dont je limiterai le récit clinique aux points essentiels évoquant ce processus d’effacement. Il s’agit de Sabine que j’ai suivi pendant de nombreuses années en CMP, centre médico psychologique, en psychiatrie adulte. Sabine était une jeune femme de 21 ans qui demandait à être reçue en raison d’idées suicidaires. Sabine était très silencieuse, comme anesthésiée, indifférente à tout. Son récit laborieux était entrecoupé de longs silences. Sabine parlait d’une petite voix à peine audible, restait toute la séance campée sur sa chaise dans une immobilité statuaire que la blancheur de sa peau renforçait. Rapidement, le récit de Sabine se centra sur le lien à sa mère qui la préoccupait : elle avait peur que sa mère meure. De son père et de son frère elle ne parlait guère. Elle disait qu’avec sa mère elles étaient « siamoises de la tête » : elles pensaient la même chose, toujours, sans avoir à se parler. Toute séparation les menaçait de désespoir. Elles ne faisaient qu’une : elle était sa mère, et sa mère était elle. Le récit s’écartait peu de la description d’une double relation anaclitique entre elle deux. Sa mère terrifiée à l’idée de la perdre à la naissance, qu’elle soit échangée contre un autre bébé sans qu’elle puisse le reconnaître, car tous les bébés se ressemblent, avait initié un collage absolu entre elles dès son premier souffle. Sabine décrivait cette unité parfaite selon elle qu’elle constituait avec sa mère, sans qu’aucun affect ne vienne la troubler. Cependant, au cours des séances, le silence et le blanc changèrent de teneur. Ils s’épaissirent, s’alourdirent et éveillèrent en moi une somnolence presque douloureuse. En même temps, l’effacement psychique continuait d’infiltrer son discours. Elle rapporta des rêves dans lesquels c’était « comme dans la réalité » : elle était en présence de sa mère, elle la regardait faire et dire les choses à sa place. Au quotidien, elle regardait sa mère vivre pour elle, elle n’existait pas. C’est pourquoi elle ne pouvait pas quitter le corps de sa mère qui lui servait de corps, sa pensée qui lui servait de pensée. Elles avaient un corps et une pensée pour deux. Sabine, de plus, disait chercher son double de partout. Peut-être avait-elle eu une jumelle, morte pendant la grossesse de sa mère ? Je me disais que c’était peut-être « elle » qu’elle cherchait de partout. Elle comme « sujet perdu », pour reprendre les propositions de D. Quinodoz et R. Roussillon. La jumelle morte serait l’émergence d’une première représentation d’un vécu de mort psychique, de disparition subjective. L’autre, celle qui était née, en serait la trace corporelle : elle n’était qu’un corps inanimé, vidé de toute subjectivité. Mais aussi, la jumelle morte pouvait être la représentation de l’objet perdu ou pas rencontré. En effet, la suite de son récit s’ouvrit sur une mère déprimée, triste, habitée par les morts de personnes importantes pour elle juste avant et pendant sa grossesse. Sabine formula alors qu’elle devait réparer sa mère, en prendre soin. Elle devait la protéger en lui offrant tout et en ne la quittant jamais : cela pourrait lui être fatale. Lui : à elle, mais surtout à sa mère. La lenteur de son discours dénué d’affect et d’associativité réflexive s’accentua encore. Ce poids du récit, sa blancheur, sa lourdeur, l’épaisseur de son silence annonçaient, j’en ferai l’hypothèse plus tard, le surgissement dans le transfert du signifiant formel d’effacement partagé.
En effet, un jour je réalisais soudain que j’avais quitté la séance dans un mouvement de disparition qui avait effacé en moi la séance, la rencontre analytique, le temps, l’espace. J’avais été plongée dans une absence totale assez déstabilisante. C’est en revenant dans la séance que je constatai l’effacement dans lequel j’avais glissée sans le sentir. Sabine était en face de moi, silencieuse, immobile. Je nommais le silence dans la séance. Sabine me dit qu’elle était ailleurs. Ce silence était un temps blanc, sans rien, dit-elle. J’interrogeais : un temps qui pourrait être un temps comme quand sa mère était absente ? Elle dit à nouveau que sans sa mère elle était rien. Entendant l’absence de négation, je lui demandai alors ce que c’était qu’être « rien », elle répondit : être un fantôme. Son fantôme ou celui de sa mère elle ne savait pas. « Le fantôme », nouvelle représentation d’un vécu d’effacement qui entrait en écho avec celui que j’avais été dans la dynamique transféro-contre-transférentielle, allait prendre corps. Sabine décrivit une mère à qui elle parlait pendant des heures, qui était toujours d’accord sur tout avec elle, et qui ne parlait pas, absorbée par elle ne savait quoi. Une maman « comme morte dedans » dit-elle. Une maman qui disparaissait brusquement pour aller pleurer. Elle se souvint de la chercher dans toute la maison, de l’entendre pleurer derrière la porte de sa chambre où d’une autre pièce dans laquelle sa mère s’était réfugiée. La disparition pris alors corps dans la réalité extérieure : elle perdit toutes ses photos. Toujours sans émotion apparente elle raconta qu’elle prenait des photos de tout, pour garder des traces de tout car elle oubliait tout. « Tout s’efface en moi dit-elle, je ne retiens rien ». Sabine put dire alors sa peur d’oublier sa mère ou que celle-ci disparaisse. La question de l’effacement confondait la disparition du sujet et de l’objet. Le vécu d’effacement émergea à nouveau dans le transfert.
Je fus saisie une nouvelle fois par cette absence totale. Quand je revins à la séance, je la vis absorbée dans le silence et prononçais son nom. Elle sursauta et me dit qu’elle était ailleurs, elle ne savait pas où. Elle n’en gardait pas de traces, tout autour d’elle et en elle avait disparu : tout avait été scotomisé. Troublée par ce moment d’effacement conjoint, je lui dis que moi aussi j’avais été ailleurs quelques minutes. « Nous avons alors disparue ensemble » dit-elle. Quand plus tard elle voulut partager avec moi ces moments de disparition qu’elle se mit à découvrir en elle dans ses journées, elle disait : « vous savez », ou « vous comprenez » en référence à cette séance. Elle dit l’importance pour elle de ce moment d’effacement partagé, « comme ça, ça devient plus vrai », dit-elle.
Pendant les séances, elle commença à identifier les moments où elle glissait ailleurs et put décrire progressivement la sensation qui les accompagnait : « ça se vide, ça se dissout ». Elle ne voyait plus rien, ne pensait plus à rien, c’était tout blanc. Dans un premier temps elle dit qu’ainsi, elle se sentait protégée de tout. Plus rien ne l’atteignait. Aucune excitation venant du monde externe, ou du monde interne ne pouvait la troubler. Souvent elle était aussi hors de son corps, à côté de lui. Dans les séances, elle mit ces moments en lien avec mon silence et les variations de mon écoute auxquels elle se découvrit sensible. Elle put saisir la répétition de ces moments dans son quotidien en présence de sa mère, de son compagnon et l’idée que l’angoisse, la peur, la tristesse ou tout autre affect puissent se tapir dans ces vécus devint pour elle une pensée envisageable.
Chez de nombreux patients, l’effacement partagé a permis la reconnaissance puis la saisie d’expériences d’effacement non appropriées, c’est-à-dire non reconnues, non senties, non perçues par le sujet. Les spécificités, les modalités de ces expériences d’effacement ont pu retrouver cette première forme corporelle qu’offrent des signifiants formels : « ça glisse, ça s’évapore, ça se fige dans le vide », mais aussi « ça se dissout, ça devient nuageux, ça scotomise, ça s’étire, ça troue, ça s’émiette, ça rétrécit… » dans ou jusqu’à l’effacement. Chaque patient put retrouver comment l’expérience d’effacement prenait corps en lui.
Ces sensations hallucinées, différentes pour tous, exprimeraient une spécificité de la réalité historique de chacun et témoigneraient de comment « ça avait glissé, ça s’était figé, troué, étiré, dissout…» pour eux dans ces expériences catastrophiques. La possibilité de repérer et retrouver ces sensations en eux et d’en construire une première représentation, permet l’amorce de la réintégration de l’expérience catastrophique.
L’effacement partagé met à jour quelque chose dans le sujet qui le constitue de blanc, de vide, de rien. Il met à jour une modalité d’être qui modifie son rapport à lui-même : les patients disent glisser ou être dans le blanc, l’oubli, la non-pensée, son rapport à l’autre dont soudain il ne sent plus la présence corporelle ni psychique, son rapport à l’environnement enfin car l’espace et le temps sont abolis. L’effacement psychique devient dès lors un objet psychique apporté par le patient en séance, à saisir, un objet contenant des vécus qui tendent toujours à le faire disparaître, à l’effacer et qui cherchent un point de saisissement dans la rencontre avec le thérapeute pour être réintégrés dans la chaine représentative et pour que cesse cette répétition d’un effacement qui saisit et affecte leur subjectivité et leur rapport à l’environnement.
Spontanément, en séance, les nominations de l’effacement créèrent une « métaphore spatiale », pour reprendre la proposition de Widlöcher (2007). Les patients disaient « être dans le blanc, dans l’évaporation, le trou… », ils était « ailleurs ». Cette métaphore leur permettait de se donner une représentation de « cette autre scène » pour reprendre les mots de Freud, scène énigmatique qu’ils découvraient en eux. Elle leur permettait de localiser, de circonscrire le non-représentable, le non-localisable, le non-saisissable. Elle offrait un lieu contenant ce noyau du moi qui se localise à la périphérie…en position d’exterritorialité quand le moi n’habite pas le psychisme comme le décrit D. Anzieu (1990). Avec cette métaphore, sans doute liée à un « transfert de conteneur » comme le théorise Ch. Guérin (84), lequel permet de reprendre ce que le « je » a exporté, l’effacement psychique devint une sorte d’espace psychique dans lequel la réalité historique du patient allait tendre à se rehistoriciser par la saisie et la transformation des expériences désubjectivantes.
Pour certains patients, la métaphore spatiale a été précédé par une localisation géographique de l’expérience traumatique. Ainsi Céleste, dont la terrible histoire incestuelle indépassable la conduira au suicide, raconte comment lors des visites nocturnes de son père elle se « logeait » dans l’angle du mur, au plafond, et comment pour tenter de lui échapper, elle montait sur le toit de sa maison pour être hors d’atteinte. Pour Céleste, la sensation d’« être dans l’angle du mur » ou « être sur le toit » étaient devenus pendant les séances le moyen de me signifier qu’elle percevait en elle des sensations, réactivées par la dynamique transféro-contre-transférentielle, qui ne pouvaient pas encore être saisis dans cette première forme corporelle qu’offrent les signifiants formels. Dario quant à lui, que sa mère enfermait dans un placard enfant, put approcher ses états d’effacement en retrouvant en lui, comme pour Céleste, la sensation « d’être dans le placard ». Ensuite seulement « être dans l’angle ou sur le toit », « être dans le placard » fera éprouver les premières modalités d’effacement psychique : « ça blanchi, ça troue, ça dissèque… ». Les patients projetaient ainsi dans l’espace géographique ou dans l’espace offert par la formulation du signifiant formel d’effacement, les premières représentations corporelles de ces expériences traumatiques. Cette métaphore spatiale venait confirmer l’extériorité de ces expériences qui ne leur appartenaient pas encore. Ça se passait ailleurs, même si leur présence dans la dynamique transféro-contre-transférentiels indiquait que ces vécus d’effacement amorçaient leur réintégration dans le moi et l’histoire du sujet.
De là s’est imposé un troisième temps du processus d’effacement psychique, découlant des deux premiers : la topique. Non pas une topique au sens freudien qui organiserait l’appareil psychique, mais une topique au sens d’un espace psychique relatif à une organisation du moi évoluant dans le temps du sujet, spécifique à certaines expériences précoces traumatiques, et caractérisant, pour reprendre les mots de Freud, « un état dans l’état » qui se dérobe au sujet. Cette topique, lieu paradoxal que les sujets habitent sans y habiter serait comme « la maison de l’effacement du sujet », en référence aux travaux de G. Pankow. G. Pankow proposait d’entrer dans le monde du psychotique comme dans une maison et de donner ainsi corps à des représentations de l’espace, du temps. Pour elle la façon dont le sujet habitait l’espace et son corps étaient des supports pour mettre en représentation les vécus de dissociation. Le corps était envisagé comme une structure spatiale dont la construction psychique et les vécus qu’il abritait, étaient porteurs des éléments historiques traumatiques. La topique de l’effacement figurerait cette structure spatiale de l’effacement dont la construction repose sur des éléments historiques traumatiques qu’il faudra explorer par la façon dont le sujet habite, par l’effacement, l’espace, son corps et la relation aux autres.
Dans les séances avec Sabine le blanc laissé par la scotomisation devint le lieu où nous nous rencontrions, et à travers cette rencontre organisée par la dynamique transféro-contre-transférentielle, le lieu où elle rencontrait ou retrouvait les vécus traumatiques logés dans la rencontre avec l’objet. L’introduction de la médiation pâte-à-modeler, que je ne peux pas développer maintenant, permit de les saisir. Avec d’autres patients dont les capacités représentatives sont moins altérées, les images et les signifiants verbaux sont des objets de médiation qui permettent de capter ces sensations. La thérapeute et le patient « entrent » alors dans l’effacement et explorent les processus primaires et les vécus archaïques qui le construisent.
Ces vécus et ces processus nous ramenaient toujours aux échec ou aux écueils des processus de différenciation et d’individuation.
Sabine reconstruisit comme « ça s’éclipsait » en elle au contact de sa mère. A la fois dans ce collage par la pensée, les siamoises de la tête, et à la fois dans la béance qui les séparait : il n’y avait pas de contact physique entre elles. Elles ne se touchaient pas. Seule une grande pensée délirante pouvait les lier constamment au-delà de toutes les contraintes imposées par la réalité. Elle témoignait de ses tentatives pour retenir un objet insaisissable et disparaissant toujours, un objet indisponible car habité, bouché par ce que Sabine appelait, sa dépression. L’idée de sa propre tristesse, angoisse ou peur trouva des points d’appuis dans les éléments de sa vie. Elle relia en effet ses éclipses, ses scotomisations à ces moments dont l’insupportable apparaissait. Plus les espaces de l’une et de l’autre prenaient corps, plus Sabine étouffait au contact de sa mère et plus la séparation se teintait de terreur. Les questions d’altérité et de différenciation commençaient à se travailler et avec eux les abîmes qu’ils éveillaient.
Elle commença à se sentir à l’étroit dans la relation à sa mère, à s’irriter de sa façon de dire « oui » à tout, de ne pas l’écouter, d’être comme elle pour tout. Elle eut envie d’habiter « un peu seule », dans une sorte de studio accolé à la maison de ses parents. Son père, qui jusqu’alors n’avait qu’une présence en arrière-fond prit plus de place, comme objet d’étayage, de soutien, dans des modalités relationnelles plus tendre. De même, son frère devint/redevint un objet auquel elle put se lier. Le lien anaclitique à sa mère, sans s’abandonner, se transféra sur son compagnon avec qui elle emménagea, ce qui lui donna l’impression d’échapper à ce lien de soumission mortifère qui la liait à sa mère. L’exploration des vécus d’effacement et des processus qui le composaient avait donné naissance à une histoire racontable dans laquelle la réalité subjective prenait corps lentement.
Cependant, quelque chose en séance ramenait sans cesse les deux protagonistes de la rencontre analytique dans les vécus d’effacement véhiculés par la dynamique transféro-contre-transférentielle. Pensée blanchie et confuse, trouée, oublis et ruptures associatives, fatigue et désinvestissement. L’alternance de sensations lourdes de collage ou de lâchage total, d’assimilation à l’autre dans une sorte de non-pensée ou de détachement complet, d’étouffement ou d’asphyxie en présence de l’autre ou de non-perception de la présence de l’autre se répétaient. Je le repérai avec d’autres patients pris par cette même problématique d’effacement psychique.
Je reliais ces motifs transférentiels d’effacement avec des vécus appartenant à des expériences archaïques traumatiques dans lesquelles les modalités de relation avec l’objet primaire auraient mêlé ou/et alterné l’excès et le manque. Ils s’enchainaient dans une sorte de boucle de Moebius : l’un versant et se retournant toujours dans l’autre. Ce mouvement barrait l’accès à l’altérité et à l’intersubjectivité, au développement des processus d’individuation /différenciation.
Cela m’a conduite à donner à cette topique les caractéristiques d’une enveloppe d’effacement psychique.
Freud décrit le fonctionnement de notre appareil psychique par la liaison de deux couches qui le composent : une première couche extérieure, double, qui reçoit les excitations externes, ou internes, à laquelle est attribuée une fonction de protection, qu’il appelle pare-stimulus. La deuxième, interne, reçoit et garde l’inscription des excitations. Ces deux couches sont reliées par un flux d’innervation dont la discontinuité, la rupture provoque l’inexcitation du système perceptif.
Didier Anzieu, dans son article Cadre psychanalytique et enveloppe psychique (1986) et dans L’épiderme nomade et la peau psychique (1990) reprend cette structuration en double feuillet de l’enveloppe psychique. L’appareil psychique de l’enfant acquiert un Moi, écrit-il, quand s’amorce cette structure à double enveloppe. L’une, l’enveloppe pare-excitation recevant les excitations, interpose un écran protecteur entre le monde extérieur et la réalité psychique, elle joue un rôle quantitatif. L’autre, l’enveloppe surface d’inscription, recevant les significations, est la membrane sensible de l’appareil psychique ; elle est support de projections, écran récepteur, enveloppe d’inscription/communication. Elle a une fonction de filtre qualitatif au service de la communication. L’enveloppe psychique est ainsi à la fois pellicule à double face dont l’une est tournée vers le monde interne, l’autre vers le monde externe, et interface dans sa fonction de séparer ou mettre en relation ces deux mondes.
Selon D Anzieu le développement de l’appareil psychique passent par la différenciation progressive, en trois étapes, de ces deux enveloppes. A l’indifférenciation, succèderont le décollement et l’emboitement des enveloppes psychiques. Il propose ensuite différentes combinaisons de ces deux enveloppes, chacune caractéristique d’une pathologie.
Les rencontres avec les patients m’ont conduite à faire l’hypothèse que les expériences d’effacement psychique auraient altéré le développement des deux enveloppes qui se seraient construites chacune selon des modalités d’effacement. Sous le choc des impacts traumatiques, la première enveloppe ne peut construire sa fonction de pare-excitation. Elle vole en éclats laissant le moi sans protection. La défense primaire par retournement reprend à son compte l’effacement qui va occuper la fonction de pare-excitation. Les sujets ne ressentent plus. La surface d’inscription, espace de projection des images tactiles et visuelles, reçoit des expériences marquées par l’effacement qu’elle ne peut plus ni différencier ni saisir, et dont la surcharge provoque l’effacement des inscriptions, la perte de la capacité de fixer les traces. Les deux enveloppes psychiques s’emboiteraient, se reliraient, dans et par l’effacement : le blanc d’affect et le blanc de représentation se combineraient et créeraient dans le moi un espace d’effacement psychique sans issu, car le flux d’innervation les reliant réactiverait sans cesse les vécus d’effacement, les enchâsserait. Les deux couches de l’enveloppe d’effacement ne pourraient plus se différencier et l’effacement psychique organiserait le moi du sujet dans son rapport à lui-même, à l’autre, à l’environnement.
Ainsi, l’effacement psychique ne serait pas du « rien », mais un mode de construction subjective. Être dans l’effacement, être effacé serait la modalité par laquelle le sujet est sujet, communique, est présent à l’autre, à lui-même. Il présenterait la réalité interne du sujet prise par l’effacement.
Le travail avec Sabine et les autres, sera de ressaisir, notamment grâce à la dynamique transféro-contre-transférentielle, les processus qui ont modélisé ces deux enveloppes selon des modalités d’effacement et de les transformer, afin de leur redonner leur spécificité.
Un des processus majeur que cette enveloppe d’effacement abriterait massivement serait le processus mélancolique dont la présence, délétère pour le sujet, participe au processus d’effacement psychique.
Dans le travail avec Sabine, « Le fantôme » qu’elle disait être, entra en résonance avec le fantôme qu’avait été pour elle sa mère. Une mère morte dedans, disait-elle, et ce dès avant sa naissance, déjà pendant sa grossesse, habitée et absorbée qu’elle était par les fantômes de deux pertes essentielles. « Ce fantôme » était le témoin de l’amputation subjective et de la méconnaissance du sacrifice de son sentiment d’exister. Il était le résultat des incorporats mélancoliques (R Roussillon) qui aliénaient son moi. Sabine était dissoute dans son objet, elle disparaissait subjectivement sous les effets des identifications incorporatives avec un objet dont l’échec des capacités réflexives n’avait pas pu soutenir les processus vitaux et de différenciation. En appui sur les travaux de R Roussillon, je reliais la présence mélancolique en elle à « la déception essentielle et fondamentale » dans la rencontre avec son objet primaire, qui « affecte les conditions mêmes du développement ou du maintien de l’élan vital ». L’ombre de l’objet qui tombe alors sur le moi est, propose-t-il, ce que l’objet n’a pas pu refléter, ce qui « n’a pas reçu de la part de celui-ci un écho satisfaisant et appropriable. L’ombre de l’objet est la part non réfléchissante de l’objet qui affecte le narcissisme et la fonction réflexive du fonctionnement psychique quand elle tombe sur le moi. Et lorsque le moi assimile ce qui lui est tombé dessus, poursuit R. Roussillon, « il tend à effacer « narcissiquement » l’origine de ce qui le peuple ». (2012).
Les souffrances mélancoliques sont marquées par des états d’assimilation dans lesquels la différenciation moi/non moi est abolie par la création d’une identité commune, ce que J. McDougall décrira dans le processus d’un corps pour deux. Le moi se retrouve confondu aux objets dont il porte l’ombre et ses identifications narcissiques incorporatives aliènent sa propre place. L’assimilation incorporative confond le sujet et l’objet dont le deuil est impossible à faire.
La suite du travail avec Sabine lui permit de se représenter certaines de ces expériences. Si elle continuait à acheter à sa mère les mêmes vêtements que pour elle, pour maintenir un continuum entre elle lorsqu’elles étaient séparées, aux prix de l’effacement subjectif, Sabine put dire que c’était surtout pour elle qu’elle le faisait, par peur de la perdre. Elle n’était plus sûre que sa mère souffre autant de la séparation qu’elle le pensait avant. A peine avait-elle réagi à son déménagement. Elle se demanda même si sa mère sentait ses absences. C’est alors que le désir d’avoir un bébé se fit pressant. Elle voulait recréer un corps et un esprit commun avec un bébé fille. Elle voulait une fille pour être avec elle comme elle était avec sa mère, pour reproduire cette unité qu’elle pensait ou voulait former avec celle-ci. Sabine fut très vite enceinte, d’une fille. Le « fantôme » et les expériences agonistiques furent alors vivement sollicitées. Elle exprima progressivement des angoisses terrifiantes pour elle : celle que son bébé disparaisse de son ventre. Elle disait qu’elle avait besoin d’ouvrir son ventre pour le voir. Elle savait qu’il bougeait mais parfois elle ne le sentait pas. Elle avait besoin de le voir pour s’assurer de son existence, pour le voir grandir en elle. De nombreux rêves mirent en scène la création d’un lien visuel pour le sentir : hublots, plaques vissées, portes variées vinrent se greffer sur son ventre alors que son corps devenait comme une machine. Une fois son bébé né elle raconta un jour avec panique la façon dont elle l’avait posé dans une pièce, l’avait totalement oublié, et était allé la chercher bien plus tard dans une autre pièce. Elle fut saisie d’effroi, traversée par un vacillement tsunamique la menant proche de l’évanouissement en ne la voyant pas : elle avait disparue, elle ne savait pas où elle était. Lorsqu’elle la retrouva, le regard perdu de sa fille la secoua et éveilla en elle des sensations qui interrogèrent les regards perdus et la détresse qu’elle aurait pu vivre au contact de l’absence de sa mère. L’articulation de ces vécus corporels surgissant en séance, de ces rêves, des représentations de l’effacement émergeant dans les séances, amorcèrent la reconstruction et la scénarisation d’une réalité historique et l’appropriation d’expériences agonistiques. Le corps machine et le bébé disparaissant formaient un amalgame d’hypothèses mortifères dans lesquelles elle et sa mère occupaient tour à tour ou simultanément toutes les places. Quelques séances plus tard, sabine ressentit une émotion très vive lorsqu’elle réalisa que sa fille l’appelait quand elle disparaissait en elle-même. Elle réalisa alors que sa fille était en lien avec elle. Elle pouvait lui répondre, se laisser ramener à la relation par les cris de sa fille.
Cette enveloppe d’effacement va aussi envelopper l’espace de rencontre entre le patient et le thérapeute à la manière d’une cavité primitive (R Sptiz). L’espace de la séance deviendrait comme une niche abritant non seulement les vécus de dissociation du moi mais aussi l’émergence de l’informe winnicottien. Dans les séances, des mouvements de balancement, des maniements des médium, des jeux avec la couverture ou avec le langage vinrent souligner un retrait dans un espace calme et protecteur, sorte d’espace intra-utérin. Ce lieu, comme la cavité primitive de Spitz, abritait alors « un mode étrange, vague, indistinct, à la fois agréable et désagréable qui comblait l’abîme entre l’intérieur et l’extérieur, entre passivité et action ». Dans cet espace de la séance, je relevais des circulations entre les deux protagonistes de la rencontre. Ces circulations, comme des boucles de rebond décrites par G. Haag figurant la contenance, l’entourance ou encore comme les boucles sensorimotrices décrites par Bullinger en 2007 entamant par leurs variations la constitution d’une première enveloppe corporelle qui constitueraient la face interne de l’enveloppe corporelle. Le dialogue réflexif avec le thérapeute viendrait en constituer la face externe. Ainsi, dans cet espace commençait à se réaliser ce qui n’avait pas eu lieu pour le sujet : une rencontre pouvant réfléchir les expériences d’effacement et donnant corps aux espaces et réalité internes et externes.
C’est alors que d’autres expériences dans lesquelles la pulsionnalité faisait enfin rosir la blancheur de l’effacement, vinrent déranger le calme des séances.
Sabine se rapprochait de son père et de son frère et dans son discours l’échec de l’organisation œdipienne émergeait. Derrière le père méprisé, dénigré, nié se profila le père aimé dont elle attendait l’attention et l’amour. Derrière la mère dépressive apparut l’ombre d’une femme. Toute la complexité des rapports du couple de ses parents, et des particularités de présence de chacun, alimentaient ses fantasmes incestueux inconscients. Le rapport à son conjoint devint plus complexe et chatouilla en elle des désirs adressés à des imagos parentales. Les résistances dans le travail se firent plus fortes, elles recouvraient la terreur suscitée par l’entrebâillement de la porte de sa réalité interne.
L’effacement psychique issu des expériences archaïques traumatiques recouvrait le « ne rien voir, rien sentir, rien penser » de toutes les scènes. Dans ses relations il venait cimenter l’emprise et le masochisme qui lui permettaient de ne pas lâcher ses objets. L’effacement de l’érotisation et des motions pulsionnelles qui maintenait silencieusement en elle les élans de destructivité et la réalisation inconsciente de désirs incestuels œdipiens, masquait l’érotisation de l’effacement. La recherche d’un lien en homosexualité en double dans la rencontre avec le psychologue, soutien de l’émergence de la réflexivité (R. Roussillon), jetait le voile sur l’expression de pulsions homosexuelles incestuelles inconscientes.
Mais l’effacement psychique n'étouffait plus complètement la revendication pulsionnelle du sujet.
Mais les revendications pulsionnelles naissantes renforçaient les processus d’effacement psychique.
En effet, l’ampleur du processus d’effacement psychique tiendrait dans l’alliance de ces deux types d’expériences traumatiques atteignant le sujet. Celles relevant d’expériences de satisfaction pulsionnelle qui n’ont pas pu être intégrées au moi du fait d’un débordement de la psyché et dont les représentations de désir qui lui sont attachées ont été refoulées. Celles qui fondent le processus d’effacement psychique, et qui relèvent d’expériences traumatiques non représentées donc non refoulables.
Ces dernières n’ayant entrainé ni plaisir, ni satisfaction, ne sont pas en quête d’une réalisation hallucinatoire inconsciente de désir. Fairbairn en 1941 avançait que la recherche d’objet prévalait à celle de la satisfaction. R Roussillon (2012) propose que dans ces expériences catastrophiques ce n’est pas une expérience de satisfaction antérieure que le sujet veut retrouver, mais l’objet. L’objet perdu, pas rencontré ou absent. Un objet avec qui être en relation d’abord, dont la présence conditionne la survie psychique dans des expériences de détresse sans secours, sans fin, sans issue et dont ensuite, les qualités et modalités de présence et la satisfaction partagée seront la condition à l’intégration des expériences premières vécues par le sujet.
En 1991 Benno Rosenberg écrivait que le principe de plaisir est le résultat de la transformation des pulsions de mort imposée de force par la libido, que l’intrication pulsionnelle n'est rendue possible que par la présence de l’objet et des qualités spécifiques de la dyade mère-enfant. R Roussillon propose que le principe de plaisir soit un principe de liaison. Il viendrait retransformer secondairement les expériences traumatiques. Il les retransférerait dans le principe de plaisir à partir d’expériences qui elles, heureusement pour le sujet car elles sont vitales, relèvent du principe de plaisir.
La complexité du processus d’effacement tiendrait dans cet enchâssement de ces deux types d’expériences traumatiques centrées sur la recherche de l’objet : de l’objet premier nécessaire à la survie psychique, et de l’objet de désir détenteur de la satisfaction si attendue. En entremêlant ainsi ces deux types d’expériences de relation à un objet, marquées par la déception et par des expériences d’effacement psychique, l’effacement psychique est sans cesse sollicité et renforcé. Ces expériences demanderont donc à être triées, différenciés. La reconnaissance, dans le sujet, du point de nouage par lequel s’articulent de ces deux types d’expériences, soit l’expérience commune qui les confond et les lie serait le levier par lequel le sujet pourrait se dégager des effets délétèrent du processus d’effacement psychique.
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