Un projet inquiétant de réforme de la formation des psychologues
En fin d’année 2022, le gouvernement a réuni un certain nombre d’organisations[1] représentant les psychologues pour discuter d’un projet visant à réformer leur formation.
Il semble que les parties présentes se sont entendues sur la nécessité d’augmenter la durée de formation des psychologues. Un allongement parait en effet indispensable pour permettre l’intégration des données nouvelles concernant les champs traditionnels de la psychologie, des données concernant les nouveaux champs d’application de la psychologie et la formation à une diversité des pratiques.
Pour autant, de grandes divergences existent quant au fond de ce projet : le gouvernement et la plupart des organisations présentes proposent une sixième année de formation tandis que d’autres organisations (notamment le Syndicat National des Psychologues) défendent la création d’un doctorat professionnel.
L’enjeu est énorme.
Pour rappel : l’usage du titre de psychologue est réservé aux titulaires d’une licence en psychologie (bac + 3 ans) et d’un master en psychologie (bac + 5 ans) qui correspond à un diplôme de deuxième cycle universitaire – alors que, avant la réforme de 2004 qui a institué le LMD (Licence-Master- Doctorat), le psychologue était titulaire d’un diplôme de 3ème cycle (le DESS). Le diplôme de psychologue a donc été dévalorisé.
Or, l’accès à un niveau de formation doctoral parait justifié et nécessaire non seulement sur les plans des connaissances à acquérir mais aussi pour garantir l’autonomie des psychologues par rapport au corps médical.
L’ajout d’une simple sixième année risque d’être non seulement insuffisant sur le strict plan de la formation mais aussi de déboucher sur la création d’un diplôme de « psychologue de la santé » issu du ministère de la santé, dans la suite du dispositif « MonParcoursPsy », accordant peu de place à la psychologie clinique. En effet ce dispositif, mis en œuvre en avril 2022, inscrit l’intervention du psychologue sur prescription ou adressage dans un parcours médical alors que les psychologues ne sont pas des paramédicaux.
Tout mettre en œuvre pour garantir l’autonomie des psychologues est un enjeu particulièrement important pour les praticiens qui travaillent dans une orientation analytique et les psychanalystes-psychologues. En effet, il s’agit de promouvoir une conception de la vie psychique et de ses soins dans une perspective humaniste, attentive à ce qui soutient la subjectivité. Ces nouvelles propositions sont donc particulièrement préoccupantes.
Comme le souligne notre cher collègue Albert Ciccone, la santé mentale est d’abord une affaire d’humanité.
[1] A cette réunion étaient présents le syndicat national des psychologues (SNP), la Fédération Française des Psychologues et de la Psychologie (FFPP), la Société Française de Psychologie (SFP) ou encore la Fédération Nationale des Etudiants en Psychologie (FENEPSY).
Cécile Corre, Olivier Halimi.