Il s’agit d’un ouvrage collectif très hétérogène, mais avec un point commun : tous les auteurs font appel à Judith Butler et Gayle Rubin, féministes et lesbiennes mais non psychanalystes.
D’emblée, il est important de noter que les théories du genre, réduisant le sexe au genre, sont différentes des études de genre. G. Rubin dénie l’influence de l’anatomie sur l’identité dans le but d’une émancipation de la première assignation de genre, tout en ignorant l’assignation de genre par l’inconscient des parents. L. Kahn propose une lecture critique de Butler en comparaison avec Rubin et d’autres auteurs dont Jean Laplanche, pour arriver à conclure que « la sexuation des corps, mâle-femelle, ne dépend pas, ne dérive pas, ne peut pas dériver de l’action du langage. Ce qui dérive éventuellement de l’action du langage, ce sont des identités sexuelles… » L’articulation entre genre et sexe anatomique montre l’influence de l’environnement si bien formulée par la phrase célèbre de Winnicott, qui ne se réduit pas à la bisexualité : « Vous êtes un homme et j’entends une fille et c’est à cette fille que je parle ».
La notion de théorie de genre est utilisée par les responsables politiques pour disqualifier la légitimité politique d’évolutions juridiques et la légitimité scientifique des études de genre interrogeant la construction sociale des inégalités, selon Réjane Sénac.
Tous ces débats ont comme fantasme sous-jacent l’indifférenciation des sexes et des sexualités afin de ranimer le débat sur l’égalité homme – femme, voulant effacer toute différence même anatomique.
Particulièrement saisissant est l’analyse d’Isée Bernateau du roman « Orlando » de Virginia Woolf qui dénonce les préjugés par rapport au sexe et montre pour le genre, socialement construit, qu’il n’a ni la même définition ni les mêmes valeurs selon les lieux et les époques.
Jacques André termine cet ouvrage par une lecture critique de Foucault qui occupe une place privilégiée dans les études de genre.
Au total, ce livre montre le débat complexe concernant le genre et les théories du genre ainsi que la place que peut y avoir la psychanalyse.
Rénate Eiber