Ce portrait du psychanalyste Ernest, ancien psychiatre, sincèrement attaché à son métier et attentif à ses patients, mais débordé par une situation qui le dépasse, est l’occasion de portraits au vitriol du monde psychanalytique. La confrontation aux problèmes éthiques soulevés par la pratique psychanalytique, du fait de sa nomination au comité de déontologie médicale de l’hôpital de Stanford, a déterminé sa vocation de psychothérapeute, mais la liberté technique qu’il revendique va contribuer aux impasses qu’il y rencontrera et dont ce roman retrace l’émergence. Il est difficile d’en dire davantage sans affaiblir la part de surprise, voire de suspense, que l’auteur distille avec maîtrise au long d’un récit attachant, irritant parfois, mais indiscutablement efficace et percutant. Psychiatre à Palo Alto, professeur émérite de psychiatrie à Stanford et animateur de thérapies de groupe, l’auteur connaît bien les milieux dont il parle avec une tendresse parfois féroce et une ironie qui oscille entre compréhension et dénonciation. Il n’est pas exclu qu’il se caricature quelque peu lui-même – notamment dans les désillusions de son personnage central qui perd peu à peu une part de sa naïveté tout en demeurant vulnérable aux manipulations – ni que ce roman ne soit à certains égards, pour qui connaît son milieu d’émergence, un récit « à clefs ». Peu importe pour nous, indiscutablement, ce récit malicieux et critique, amusant en lui-même, stimule aussi la réflexion éthique et technique du lecteur psychanalyste devant ce regard autoréflexif sur la psychiatrie et la psychanalyse américaine.