Ce livre est avant tout un roman passionnant, d’une remarquable tenue d’écriture et ainsi que le dit l’auteur dans une interview, « découpé en séquences qui reprennent les éléments du passé pour éclairer le présent », comme cela se passe au cours d’une analyse. Il concerne en effet la psychanalyse et les psychanalystes car Michel Schneider relate, certes sous une forme romancée mais à base de documents, la dérive de la relation analytique entre Greenson et Marilyn Monroe.
Lorsque l’actrice s’adresse en 1960 à Greenson, celui-ci est un psychanalyste freudien réputé de la côte ouest, mais aussi un homme fasciné par le cinéma et Marilyn est certes la déesse du sexe mais aussi une femme souffrant d’inhibitions et d’angoisses qui a déjà eu recours aux soins de deux psychanalystes freudiennes à New York.
Lors de leur première rencontre, Greenson saisit très finement la fragilité narcissique de Marilyn, manifestée notamment par une toxicomanie aux barbituriques, et avec prudence il lui refuse le divan et lui propose une psychothérapie en face à face. Mais très vite nous suivons la dérive tragique de cette relation de transfert et de contre-transfert passionnels, au cours de laquelle Greenson intervient de plus en plus massivement dans la réalité, abandonnant progressivement tout ce qui aurait dû constituer le cadre analytique de cette cure. Il l’introduit dans sa famille, s’occupe de ses contrats professionnels, lui fournit lui-même les barbituriques, etc.
Très curieusement, on peut observer que pendant le cours même de ce traitement, il élabore son ouvrage Technique et pratique de la psychanalyse, où il recense et condamne toutes les erreurs techniques qu’il a lui-même commises.
Au même moment pourtant il justifie théoriquement ses errements, au nom du concept qu’il nomme « alliance thérapeutique » et qui a rencontré une certaine estime pendant un temps.
Outre son intérêt littéraire, ce livre nous montre le risque que court un analyste dans la relation thérapeutique avec de tels patients et le rôle primordial du cadre dans ces cas. Il nous introduit aussi dans le monde si particulier du cinéma hollywoodien des années 50 et 60 et de ses rapports ambigus avec la psychanalyse.