Pas moins de quatorze chapitres dans cet ouvrage pour aborder la question du traumatisme chez l’enfant. Quatorze chapitres, quatorze approches et thématiques différentes. C’est dire qu’il s’agit d’un ouvrage complet et diversifié. Les auteures qui ont rassemblé ces textes, Marie-Laure Léandri et Anne Maupas, posent elles-mêmes la question : « Encore un livre sur le traumatisme ? » Mais le contenu justifie l’entreprise. Tant le traumatisme a toujours été et est toujours, encore plus à l’heure actuelle, au centre de la pensée psychanalytique.
L’ouvrage démarre par des réflexions théoriques, avec Freud (Marie-Laure Léandri), Ferenczi (Thierry Bokanowski), l’approche groupale des traumatismes collectifs (Philippe Robert) et les potentialités traumatiques liées aux nouvelles pratiques de la péri-natalité (Sarah Bydlovwski).
Puis le lecteur plonge dans la clinique avec des cas au long terme, rapportés dans tous leurs détails (Eva, bébé maltraitée de huit mois, suivie jusqu’à vingt ans avec Jacques Angelergues, Léa, adoptée, en thérapie de neuf à vingt ans avec Brigitte Bernion, six ans de psychothérapie de Gael avec Mathilde Girard, la petite Anne qui subit une opération nécessitée par un handicap de Gabrielle Viennet). Maria Bedos observe les effets du traumatisme sur le langage de l’enfant. Pierre Denis parle de la disqualification de la pensée afin d’éviter les excitations traumatiques.
Christine Garneau et Geneviève Welsh rapportent des cas et des situations d’équipe après l’attentat de Nice, car ces histoires cliniques mobilisent aussi beaucoup les équipes, comme le montrent Corinne Ehrenberg et Philippe Metello. Puis l’ouvrage se termine sur une note littéraire avec Ellroy, Aharon Appelfeld et Perec, commentés par Dominique Deyon.
Les situations de traumatisme évoquées par les différents auteurs sont donc diverses, mais il y a un fil conducteur, celui de l’approche psychanalytique et la question incontournable et jamais résolue de la réalité externe et la réalité psychique. Plusieurs auteurs se demandent si la question du trauma ne risque pas de faire écran à un travail sur la psychosexualité, mais en même temps on sait a quel point la reconnaissance du traumatisme réel est une nécessité, faute de quoi l’enfant est confronté au « désaveu » dont Ferenczi a montré les effets destructeurs. Les constructions post-traumatiques sont en même temps productrices de symptômes, mais aussi gardiennes de vie et donc source de créativité.
Simone Korff Sausse