L’obscène, notion que l’auteur qualifie à juste raison de protéiforme, qui suscite à la fois répulsion et fascination, est pour Corinne Maier la condition même de l’œuvre d’art. Pour fonder cette thèse, l’auteur rapproche deux convictions : d’une part l’art naît dans la faille ou la solution de continuité et la proximité entre la mort et le beau, d’autre part l’obscène si difficilement saisissable, surgit lui-même dans les interstices de la morale et de l’ordre esthétique établi.
Les exemples qu’elle prend pour étayer son propos, de Sade et Casanova à Flaubert et Chardin, puis de Courbet à Francis Bacon (sans oublier chez Freud le rêve de l’injection faite à Irma) sont ceux que l’on trouve habituellement à l’appui des théories comparables, reconnaissant tour à tour le rôle joué au fond de l’œuvre d’art par l’informe (Bataille), l’abject (Kristeva) ou la laideur (Gagnebin). Sans méconnaître l’intérêt des propositions de l’auteur, servi par une écriture vive et élégante, on regrettera l’absence d’assise historique ou anthropologique aux notions qu’elle manipule, laissant ainsi flotter l’art et plus encore l’obscène, dans une atmosphère d’universalité un peu inconsistante.