Le titre de l’ouvrage est quelque peu trompeur : si une cinquantaine de lettres d’Anna Freud à son amie nous sont proposées, elles sont précédées de deux longues introductions au moins sinon plus intéressantes que les lettres elles mêmes.
Gunther Bitner donne le point de vue d’un psychanalyste, historien de l’analyse de l’enfant et de l’ère de la pédagogie analytique et un texte de Victor Ross, fils d’Eva Rosenfeld.
Ces deux textes nous en disent plus que les lettres elle mêmes sur ces deux personnalités, femmes de valeurs qui, de l’immédiat après-guerre de 14 jusqu’en 1932, échangèrent avec tendresse (en tout cas du côté d’Anna puisque nous n’avons que ses textes) expériences et états d’âme, rappelant de façon très vivante cet extraordinaire entourage de Freud où se mêlaient familles, amis, patients, enfants qui n’hésitaient pas à partager appartements, vacances repas et soucis.
Il y a là un témoignage historique précieux qui apporte un éclairage sur la personnalité d’Anna Freud mais surtout, ce qui est moins connu, sur son expérience de « Pédagogie Psychanalytique » tentée dès 1927. Cette tentative est l'ancêtre, avec celle de Moscou, de ce qui sera fait avec plus ou moins de bonheur dans les années suivantes et jusqu’à nos jours dans les institutions pour enfants ou adolescents créées par des psychanalystes. Les lettres mais surtout le texte de Gunther Bitner témoignent de toutes les problématiques qu’elles engendrent : places de l’autorité, du cadre et du savoir entre autres, déjà comprises par Anna Freud, témoignant de son intelligence et de sa lucidité.