Tout autre est l’ouvrage de J.-B.Pontalis, dont le projet dit-il, était d’écrire un éloge de l’amitié et qui se refuse à croire que l’ami véritable de la fable de La Fontaine n’est qu’un songe.
L’amitié chez Pontalis est celle vécue dans la proximité des rencontres, des partages et des échanges. Elle se vit sur un mode adolescent où le meilleur ami, comme au lycée, est celui « qu’on raccompagne chez lui et qui vous raccompagne à son tour ».
Pour traiter de l’amitié, Pontalis construit son livre autour de très courts chapitres, livrant souvenirs, pensées, références avec une légèreté qui convient parfaitement au thème. Dans le deuxième chapitre, intitulé « Aperçus », il précise avec finesse, ce qui pourrait caractériser l’amitié, et de quelle manière elle se distingue de l’amour en ce qu’« elle se disjoint de la sexualité ».
Pas de climat passionnel, de ruptures bruyantes et dramatiques, avec lui les amis semblent s’effacer un jour, sans qu’il ne puisse très bien se souvenir depuis combien de temps ni pourquoi.
Hormis par la mort, comme dans le dernier chapitre, où la disparition de l’ami le conduit à errer au Père Lachaise, convoquant ses souvenirs en des pages émouvantes mais où l’évocation s’achève dans un profond refus de la mort, vers une promesse de rencontre toujours possible.
J.-B. Pontalis n’attend pas tout de l’ami. Il le veut à la fois autre, un alter ego, différent mais pas trop, qui l’ouvre à d’autres mondes et dont le regard porté sur lui l’enrichisse d’une nouvelle perception de lui-même.
Bref, l’amitié lui fait du bien et on est enclin à suivre son conseil : « Si j’étais à la place d’une femme, je me méfierais d’un homme qui n’a pas d’amis ».