Dans Le Féminin mélancolique, Catherine Chabert s’est intéressée « aux excès narcissiques de la mélancolie » et à leur logique d’effacement comme tentative d’annulation de la différence moi/autre et de la différence des sexes.
L’originalité des textes réunis dans L'amour de la différence est d’insister sur les « mouvements sexuels qui ordonnent ces configurations », sur les effets de la bisexualité et de la logique « de la différence qui soutient et affirme l’existence et la reconnaissance d’objets internes pris dans les réseaux de la sexualité, quels qu’en soient les registres » et dont on retrouve les traces au fondement, dans la dynamique et l’intimité la plus absolue de toute psyché.
C’est ainsi qu’au cours de la rencontre analytique, « une intimité extrême y côtoie une étrangèreté radicale ». Entre la nécessité de penser secrètement et l’exigence de la méthode analytique de tout dire, se déploie une histoire singulière, créée par le patient et l’analyste, qui constitue ce que Catherine Chabert propose d’appeler « le noyau de l’intime » qu’il est difficile de transmettre sans crainte de trahison.
La fiction peut permettre d’approcher l’expérience au sens de ce qui s’éprouve. Et c’est à partir de l’analyse psychanalytique de textes littéraires et de vignettes cliniques que Catherine Chabert montre de façon éclairante les effets dus aux déclinaisons de la psychosexualité qu’impliquent les problématiques de perte.
Elle propose une réflexion sur le sens de l’attente « entre-deux » ou « entre-eux-deux », de l’attente entre crainte et espoir, sur les effets délétères d’une culpabilité inconsciente que l’on rencontre dans la mélancolie et certaines formes graves de masochisme moral, sur la virulence d’un surmoi au féminin, sur la perception, en-deçà des mots, d’affects pris dans le corps du transfert, sur la signification métapsychologique du mépris -une notion qui n’est pas analytique-, qui peut constituer une méprise lorsqu’il revient sur le moi assailli par l’ombre de l’objet, sur les notions de triomphes narcissique et maniaque …
La haine de la différence, la jalousie ne trouveraient-elles pas leurs sources dans les traces laissées par des identifications sexuelles effectives ?
Catherine Chabert analyse les pièges que peuvent tendre le narcissisme et la mélancolie vers l’accès à la reconnaissance de l’autre dans sa différence. Et elle pose la question : n’existe-t-il pas une part de mélancolie dans toute cure ?