Six ans après la première édition de l’ouvrage chez Delachaux et Niestlé, La figurabilité psychique de César et Sára Botella, est rééditée par In press, avec l’adjonction d’une préface à la deuxième édition qui vise notamment à justifier le choix de « figurabilité » plutôt que de « présentation » (contrairement à Laurence Khan par exemple) pour la traduction de Darstellung. L’appropriation par la langue d’accueil est créatrice et pas seulement littérale comme le soulignait récemment Paul Ricœur (Sur la traduction, 2004). Il s’ensuit une très intéressante étude sémantique de Darstellbarkeit qui conduit à de fines remarques sur le travail du rêve et son analogie dans la régression en séance.
appelons les grandes thèses de l’ouvrage. Une théorie psychanalytique centrée exclusivement sur la notion de représentation s'avère insuffisante. Les auteurs présentent une conception du psychisme qui insiste sur l'inséparabilité du négatif, du trauma et du surgissement d'une intelligibilité ; ils s'intéressent à un processuel primordial de la vie psychique, dans l'indivision entre implosion négative et éclat hallucinatoire. Ainsi s'éclairent les voies décisives qui vont de la non-représentation à la figurabilité, de la trace amnésique, qui caractérise la mémoire sans souvenir, jusqu'au rêve mémoire. Le travail de figurabilité de l'analyste, rendu possible par sa régression formelle lors de la séance permet cet accès nécessaire à la mémoire sans souvenir, au sein d'un actuel qui n'appartient pas au présent et dont la continuité avec le passé n'est pas représentable.
a première partie de l'ouvrage est centrée sur les rapports entre la figurabilité et le négatif et comporte en particulier des remarques importantes sur le négatif du cadre analytique et sur la non-représentation. Elle permet de définir la figurabilité et le travail de figurabilité, axe d'intérêt central des auteurs depuis 1983, et qui a donné lieu à leur rapport au Congrès des psychanalystes de langue française en 2001.
C'est sur la dynamique du double que se centre la deuxième partie, qui s'intéresse à la carence auto-érotique du paranoïaque avant de présenter les caractéristiques du travail en double (reprise de l'article de 1995 sur la dynamique du double en séance publié dans une Monographie de la RFP consacrée au Double). La pensée animique permet de comprendre la double conviction "seulement dedans – aussi dehors" qui consiste à nier la perception de l'objet pour pouvoir l'investir dans la représentation, condition pour le retrouver dans la perception selon le double mouvement constitutif de l'épreuve de réalité. Dans certains cures, la communauté dans la régression de la pensée peut aller jusqu'à un état pré-animique. L'analyse du fondement négatif du trauma, qui ouvre la troisième partie, permet de mieux saisir la problématique de l'hallucinatoire qui s'y trouve développée tandis que la quatrième partie propose une approche psychanalytique de la perception qui nous ramène à l'objet perdu de la satisfaction hallucinatoire et plus particulièrement à la trace originaire du manque. La prise en compte de l'hallucinatoire oblige ainsi à renouveler et à complexifier notre conception des rapports entre le perceptif et la causalité psychique.