Ce livre est tout autre chose qu’un texte de froide théorie. L’auteur considère, avec Freud, que la connaissance de l’homme éclaire et enrichit la compréhension de l’œuvre. Ce point de vue valable pour tout créateur, s’impose plus encore quand il s’agit de Freud qui n’a cessé au fil des jours de reconsidérer et de remanier une œuvre jamais close. On ne peut oublier qu’il s’agit d’un découvreur, d’un psychanalyste, le premier, dont la vie et l’œuvre ont été par lui-même décrites comme “ intimement liée ”. Alain de Mijolla écrit : “ l’homme Freud est toujours présent solidement planté au cœur de ses chapitres et tout ce qui nous fait mieux percevoir la complexité de sa personnalité ou participer aux menus évènements et aux préoccupations de sa vie quotidienne conduit à une réflexion plus poussée sur ses propositions théoriques et pratiques (et) nous permet de les appréhender de l’intérieur de nous-mêmes par les ponts, que, comparaisons conscientes et fantasmes d’identification inconscients, lancent entre lui et nous ”.
La curiosité d’un lecteur psychanalyste ou non, vis à vis d’un auteur, participe d’un mécanisme d’identification. Il comporte un déplacement d’émotions et de sentiments qui en éveillant les souvenirs, stimule et élargit le champ de la pensée. Cette présence à la fois forte et insaisissable pourrait prêter à toutes les fantaisies, mais justement le livre fourmille de précisions, de références, de témoignages et de nombreuses citations de Freud lui-même. Il met un terme à certaines rumeurs et, documents à l’appui , relate simplement certaines situations pénibles.
Rassemblant des travaux qui ont débuté en 1975, la pensée de Mijolla s’y déroule. Un sujet en appelle un autre toujours ancré dans une recherche minutieuse des positions de Freud, et de leur évolution. Sa connaissance de l’histoire de la psychanalyse lui fournit de solides repères et permet sans risque une grande liberté du penser. Le fil de la recherche démasque aussi le chercheur qui en vient à porter sa contribution à l’édifice, par l’intérêt qu’il ouvre à des sujets plus contemporains qu’il ne craint pas d’aborder avec hardiesse et modestie.