Au fil des lignes de ce livre extrêmement émouvant, J.B. Pontalis nous entraîne dans son voyage intérieur, que l’on imagine avoir duré une partie de sa vie, à propos de son questionnement sur les relations fraternelles au sein de la famille. Il interpelle quiconque se trouve dans la situation d’avoir une fratrie. C’est aussi le livre d’un homme, au crépuscule de sa vie, qui pose un regard empreint de sagesse, sans pour autant faire taire la passion, sur la question du frère.
L’auteur nous entraîne à travers de nombreux exemples empruntés à la littérature, dans une riche enquête érudite sur cette question. D’une plume alerte, il nous fait part de ses recherches sur la question de la fraternité et fait s’entrecroiser les pensées des philosophes et des psychanalystes sur le sujet. J. B. Pontalis fait aussi des liens entre métaphysique et psychanalyse dans un ensemble très cohérent. Nous faisant part, au passage, de ses pensées sur l’art.
En clinicien, l’auteur évoque le cas de patients qui viennent enrichir sa réflexion. Le psychanalyste reprend le dessus, apparaît alors son travail tout en finesse, comme pour surligner son cheminement personnel. On se sent très touché par les accents douloureux à propos de ce frère, toxicomane, reflet de l’autre, autre partie de soi, avec lequel il retrouve les jeux partagés de l’enfance, dont il questionne en toute honnêteté la souffrance. Ce frère aîné, fils aîné d’une même mère, dont on ne peut se défaire. Le second est-il le double de l’aîné pour la mère ou est-il unique ? A-t-il une existence en lui-même ? Quelle est la place du second pour celle-ci ? Est-il possible de partager une même mère, que devient alors la place de l’aîné ? L’indivision devient un sujet crucial. Petit à petit, se dessine au fil du livre la souffrance ressentie par un frère. Un portrait prend forme dont on découvre de plus en plus précisément les traits. Ce frère, objet de haine, dans un combat mêlé d’amour et de rejet, et la souffrance, évoquée avec délicatesse, qui en découle. Le questionnement devient alors une quête très douloureuse, dont l’auteur nous montre à quel point il est impossible d’y échapper, véritable « point focal » de toute une vie.
Ce livre qu’un psychanalyste ne peut s’abstenir de lire, nous entraîne dans des cheminements de pensées aux multiples directions.