Alexis Rimbaud est psychologue psychanalyste, chargé d’enseignement à Paris Diderot, ingénieur en nouvelles technologies et expert scientifique auprès des autorités judiciaires ayant à traiter des affaires pénales. C’est avec cette expérience et cette double formation, mais toujours avec un point de vue psychanalytique, et au moyen de nombreuses vignettes cliniques, que l’auteur nous invite à un voyage à travers la psychopathologie du numérique. Mais ce voyage reste optimiste, car Alexis Rimbaud montre que ces outils numériques, tant décriés, en particulier par les psychanalystes, offrent en fait de formidables possibilités dans le domaine culturel, ainsi que dans le champ du soin psychique.
Et c’est là que cet ouvrage peut intéresser le lecteur psychanalyste, car il lui donne des outils pour comprendre ces phénomènes qui dominent de plus en plus le monde des adolescents qui viennent dans les institutions et les cabinets.
Il aborde aussi la question des parents, débordés, qui n’arrivent plus à assurer la fonction de pare-excitation, attaquée par des facteurs endogènes et exogènes.
L’intérêt de ouvrage est qu’il tente sans cesse de trouver des articulations avec la théorie psychanalytique, principalement lacanienne, et aussi de se référer au contexte socio-politique, en montrant le rôle du numérique dans les attentats en France et les fusillades américaines.
Internet est un espace-temps qui pose la question du regard ce que l’auteur étudie en référence avec le stade du miroir et le schéma optique de Lacan. C’est une quête identitaire qui se joue dans les réseaux sociaux, qui n’est pas sans rappeler le roman familial et qui peut aussi bien faire vaciller l’identité ou proposer des images d’identification structurantes.
Dans un dernier chapitre sur les méthodes et approches thérapiques, Alexis Rimbaud montre comment il se sert des jeux vidéos dans les séances. Notons que cela avait déjà été inauguré par Serge Tisseron, Michael Stora et Sylvain Missonnier. Lorsqu’ils sont encadrés, pris dans un lien transférentiel basé sur le soutien et l’étayage, les jeux vidéos peuvent être un atout précieux auprès d’enfants et adolescents en difficulté.
Un exemple permet de montrer les effets positifs des jeux vidéos, contre les idées reçues. En 1995, des ateliers informatiques ont été menés dans des classes primaires, où il fallait commander un robot selon des consignes extrêmement précises, faisant appel à des ressources cognitives, sensorimotrices et artistiques. Cette expérience a produit un grand changement dans les compétences et le comportement des élèves, surtout les plus violents.
Néanmoins, l’auteur tient beaucoup à maintenir la différenciation entre la trace numérique et l’acte de parole, le virtuel et l’élaboration symbolique, qui ne sont pas du même registre, même si l’un peut conduire à l’autre.
Simone Korff-Sausse.