Sous l'égide de la croyance, c'est à une enquête minutieuse sur la genèse de la psychanalyse que se livre Emmanuel Schwab. Cette recherche généalogique, dont l'esprit repose sur l'idée que Freud aurait vécu une forme de "crise initiatique" lui permettant d'assumer pour son propre compte son rapport à ses origines, reprend et interprète en détail les perplexités, bouleversements et remaniements identitaires et théoriques de Freud entre 1895 et 1901, l'élaboration de l'Esquisse, la période de l'auto-analyse avec les relations de Freud à son père et au judaïsme, mais aussi avec sa Nania, première initiatrice. Puis il en montre l'issue avec l'espace intime des souvenirs-écrans, la découverte de l'interprétation des rêves, et la conquête de Rome mise en rapport avec l'athéisme de Freud.
La croyance peut faire craindre le délire, mais le soupçon envers les illusions doit à son tour être soupçonné, affirme l'auteur, car il peut être porteur d'une illusion de maîtrise, voire d'une identification à la mort. L'hypothèse intéressante d'une unité du champ de la croyance, constituée à partir de la question de l'origine, permet de relier notamment l'abandon de la neurotica avec les positions de Freud envers son père, le judaïsme et sa réflexion critique sur la conviction religieuse. Ainsi peuvent jouer de manière très heuristique le croisement entre les données biographiques et les élaborations théoriques de Freud. L'ensemble de l'étude est à la fois attractif et fécond, et laisse l'envie de les confronter à l'étude des grands textes de Freud sur le phénomène religieux : Totem et tabou (1913) puis L'avenir d'une illusion, Malaise dans la culture et Moïse et le monothéisme