Vincent Pélissier, psychanalyste membre de la SPP, propose cette lecture de cinq écrivains corréziens, réunis moins par ce point commun d'une même terre, car l'assise géographique est un prétexte, que par la manière dont apparaît chez chacun d'eux une fêlure : "ce sont cinq exilés travaillés, émus par tout ce dont ils ont dû faire l'économie. Et sollicités par un ailleurs. "Tous ont partie liée avec la mort, la fin, le deuil", "fruit d'un commerce privilégié avec des vallées englouties, des villages submergés, des landes désertées".
Pierre Bergougnoux ne parle que de ce naufrage qu'il a vu et dont il a réchappé, en une tension lié au déjà fini, toujours insaisi. Pierre Michon ressuscite les vies minuscules en disant l'incompréhension abyssale qui les enveloppe ; Jean Paul Michel, arc-bouté contre l'inertie ancestrale et mortifère, écrit dans un monde désenchanté. Alain Lercher évoque Oradour, en tant que descendant des morts, montrant par quels spectres est habité le grand plateau. En magnifiant les accents immémoriaux de la langue, Richard Millet montre Pythre, près des sources, dans la nuit de Néandertal du granit, avec sa ténacité à rester autre et ses silences, émergence et scorie du peuple des enfants du plateau et de la combe.
Pour l'auteur, une lecture est "une marche ou un reposoir, un assaut et une délivrance, une respiration ou une incision". Nous sommes invités par lui à partager ses lectures, en une rédaction ciselée à l'émotion contenue ; et nous éprouvons qu'en (re)découvrant avec lui ces écrivains, nous sommes en même temps au cœur d'une méditation sur l'écriture et sur l'existence, à la fois vulnérable, paisible et fervente, mais hantée, habitée par la conscience que nous sommes des survivants. "L'écriture ne s'avance que là où l'expérience a noué la perte" dit il à propos de l'œuvre de P. Bergougnoux.