L’ouvrage publie les communications et les échanges qui se sont tenus avec André Green lors d’un colloque autour de son œuvre à Cerisy-la-salle en septembre 2004. François Richard a pris soin de retranscrire les discussions, ce qui permet de retrouver la dynamique vivante et chaleureuse de ces moments de travail détendus mais denses et intenses. Il ne s’agissait pas seulement de rendre hommage à la recherche permanente d’André Green et au modèle original par lequel il reconceptualise les fondements de la psychanalyse en articulation vivante avec une pensée clinique rénovée. À partir de cette œuvre, et avec la participation très active d’André Green, l’ambition réussie était de contribuer à dégager un nouveau paradigme susceptible de ressaisir les enjeux d’une psychanalyse contemporaine, d’en problématiser les concepts et les pratiques, de proposer des reformulations.
César Botella ouvre le colloque autour de la notion de paradigme évolutif et du concept de pensée clinique. Le modèle limite est mis à l’épreuve et enrichi par la réflexion sur des formes essentielles de la clinique contemporaine : hypocondrie et addiction (B. Brusset), boulimie (C. Combe), hallucinatoire du transfert (Guy Lavallée) violence (C. Balier, Rosine Perelberg). Nathalie Zaltzman interroge la question de la transformation du mal « entre Freud et Dostoïevski » dans un très beau commentaire de la position de chacun des fils dans Les frères Karamazov.
Les transformations et aménagements du cadre et de la méthode sont envisagés par René Roussillon et Claude Smadja ; c’est le cadre de la représentation dans la psychanalyse actuelle qui retient l’attention de Fernando Urribarri. Avec Anne Denis, nous sommes en deçà du figuratif, avec Marilia Aisenstein, dans les échecs et les destructions du processus de pensée tandis que Geneviève Haag nous montre l’importance des temporalités rythmiques et circulaires dans la formation des représentations corporelles et spatiales et que François Duparc se préoccupe de la ressaisie de l’infantile.
La question du sujet est orchestrée par les contributions de Raymond Cahn et de François Richard, celle du transfert fait l’objet des réflexions de Patrick Miller et de Guy Lavallée, l’importance du langage est soulignée par Patrick Guyomard et par Gilbert Diatkine – qui retrace toute l’élaboration de la conception psychanalytique du langage et chez Lacan et chez André Green. On sait le rôle central du concept de tiercéité dans la réflexion d’André Green : Christian Delourmel en dégage quelques figures, tandis que Sara Botella propose une élaboration audacieuse des racines traumatiques du complexe d’Œdipe.
Les échanges remarquables avec Roger-Pol Droit (sur la barbarie), Maurice Godelier (sur les métamorphoses de la parenté), Jean-Didier Vincent (sur la « biologie du désir ») et Julia Kristeva (sur la féminité, le langage, la perversion et la sublimation) ont aidé à resituer les débats dans l’actualité de la culture et de la pensée scientifique.
La seule énumération des perspectives abordées dans ce colloque ne peut satisfaire ni la rédactrice ni le lecteur ; mais elle est une invitation à aller découvrir et travailler la pensée clinique multiforme qui s’y exprime, pour élargir aux lecteurs de l’ouvrage le dialogue fécond qui a marqué ces journées consacrées à une psychanalyse ouverte et rigoureuse, vivante et pensante.