Lettre de la Présidente n°5
Chères et chers Collègues,
Quelques réflexions pratiques sur le déconfinement
A ce jour, Lundi 4 Mai, nos instances gouvernementales nous annoncent une possibilité de déconfinement dès Lundi prochain 11 Mai. Comment penser le retour de nos patients en présentiel ?
La variabilité de nos pratiques et de nos propres réactions face au virus rend toute généralisation impossible. Et, de toute façon, chacun est décisionnaire de son application personnelle et doit se sentir à l’aise dans les propositions de cadre faites aux patients, compte tenu des modalités différentes de l’introjection de nos cadres internes.
Cependant, de nombreux collègues se tournent vers les instances pour évaluer les différentes stratégies possibles. C’est à ce titre que je vous propose quelques réflexions, autour des règles de « distanciation physique » auxquelles nous sommes tenus, c’est-à-dire liberté de circulation, d’exercice professionnel et de rencontre en présentiel avec une limite des groupes à 10 personnes, une distance de plus d’un mètre entre deux personnes et l’application des gestes barrières.
1- Au plan clinique
Au cabinet : le retour en présentiel des patients est sur le papier tout à fait possible, avec quelques précautions :
– Mise à disposition de gel hydroalcoolique. Désinfection régulière des poignées de porte, interphone, digicode, accoudoirs. Pulvérisation régulière d’un bactéricide dans la pièce, sur le divan et les fauteuils, et aération régulière. Dans le cas de face à face, distance de plus d’un mètre (je dirais d’ailleurs de plus de deux mètres), pas de poignées de main.
– Faut-il des masques ? Cela est une décision individuelle. Un analyste qui sait avoir été malade du Covid (testé en virologie pendant, ou en sérologie après) peut s’en dispenser, ou vouloir rassurer ses patients en le portant. Les analystes qui n’ont pas été touchés par le virus pourraient être davantage protégés en portant un masque.
En ce qui concerne les patients, le plus simple serait de laisser les patients juges de porter ou non un masque. Il peut être aussi possible de leur demander d’en porter.
– Il est important de tenir compte de chaque situation individuelle avant de décider un retour au cabinet : Individuel pour chaque analyste, selon sa sensibilité, ses facteurs de risque, le déplacement domicile-cabinet éventuel et ses modalités, et surtout sa tranquillité d’écoute de son patient.
Individuel pour chaque patient d’autre part, en tenant compte des mêmes facteurs que précédemment, et des dimensions psychiques conscientes et inconscientes de l’épidémie pour chacun d’entre eux. Il parait certain que certains patients auront besoin de plus de temps que d’autres pour s’autoriser au retour à une vie normale, et cela constituera un enjeu du travail à venir.
La question du mode de transport des patients lorsqu’il viennent à nos séances peut également être considérée. Le risque de contamination étant plus élevé dans les transports en commun, il convient de l’évaluer de façon individuelle avec chacun des patients, en prenant en compte les aspects concrets (vulnérabilité somatique ou liée à l’âge) et les aspects intrapsychiques, transférentiels et contre transférentiels (sentiment de toute puissance ou déni du danger, transfert amoureux, contre transfert maternel protecteur ou séducteur etc.).
– En ce qui concerne les activités de groupe, les décisions seront encore plus délicates, puisqu’elles devront intégrer l’espace disponible dans la pièce en fonction du nombre de participants, et le degré de rapprochement physique du travail engagé. Une situation groupale avec tous les participants masqués implique une modification perceptive qui peut altérer en profondeur les associations de chacun.
Un psychodrame où on ne peut pas s’approcher les uns des autres à moins d’un mètre peut paraitre difficile à mettre en place : comment jouer un double à un mètre ?
En institution, cela dépendra naturellement des critères propres à chacune, qu’il conviendra de respecter.
2- Au plan scientifique et institutionnel
Nous avons mis en place, comme vous l’avez vu, des réunions scientifiques par Zoom, en interne avec les conférences du Samedi, en externe avec des conférences d’introduction à la psychanalyse et des séminaires Jean Cournut. Des séminaires, groupe de travail, groupes cliniques, supervisions, se sont poursuivis à distance.
Nous avons décidé de ne pas reprendre d’activité scientifique en groupe en présentiel jusqu’à l’été, en tous cas rue Daviel.
En ce qui concerne les activités institutionnelles, elles devront se poursuivre à distance dès qu’elles impliqueront plus de 10 personnes, comme demandé par le législateur. Elles pourront aussi se poursuivre à distance avec de plus petits groupes, si des difficultés d’organisation ou le choix de beaucoup de leurs participants de rester chez eux empêche leur tenue physique. Mais des réunions en présentiel pourront également se tenir en petit groupe, rue Daviel ou chez l’un des membres des commissions. Cela pose davantage de difficulté dès lors qu’il est nécessaire de recevoir un candidat. Certaines activités ont été suspendues depuis deux mois, du fait de l’impossibilité de les organiser à distance. C’est le cas des admissions au cursus, des fins de cursus, des élections au titulariat ou au formatoriat, des entretiens avec des candidats à tous les niveaux. La SPP a besoin de se renouveler, il n’est pas bon de paralyser ainsi les évolutions. L’Institut, le Bureau, la Commission des candidatures réfléchissent aux meilleurs moyens de relancer tout cela, avec la double contrainte de la confidentialité (qui n’est pas garantie à 100% à distance) et de la difficulté à organiser des réunions en présentiel (vu les contraintes de beaucoup qui limitent leurs déplacements).
Comme vous le savez, nous avons reporté notre Assemblée Générale. Elle peut se tenir à distance, compte tenu des lois spécifiques votées. En tous les cas, les comptes doivent avoir été approuvés avant le 30 septembre. Il est donc certain que nous allons devoir l’organiser à distance, soit juste avant, soit juste après l’été.
Je sais combien chacun d’entre vous a l’intérêt de vos patients et de la SPP en ligne de mire, sans oublier pour autant votre propre sécurité. Ce qui précède vous aidera, je l’espère, à faire les meilleurs choix en fonctions de vos critères et nécessités.
Avec toutes mes amitiés,
Clarisse Baruch
Présidente de la Société psychanalytique de Paris
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